mercredi 11 avril 2012

"Les Adieux à La Reine", Benoît Jacquot

Oui, bon.



C'est là ma réaction en sortant du film "Les Adieux à la Reine". A l'aube de la Révolution, toute la Cour de Versailles, loin de s'imaginer les tracas de la populace, ne parle que de la liaison de Marie-Antoinette avec sa nouvelle favorite, Gabrielle de Polignac. L'histoire est suivie à travers les yeux de la jeune Sidonie Laborde, liseuse officielle de Marie-Antoinette, et qui développe des sentiments complexes pour la reine.


Un film d'histoire, donc. Mieux encore : un film d'histoire qui s'attache au quotidien des gens qui se retrouvent au milieu des grands événements passés, plutôt que de se focaliser sur les tenants et aboutissants géopolitiques ; c'est-à-dire un film d'histoire comme je les aime. A ce titre, on est servi : la reconstitution historique est fidèle, le tournage du film à l'intérieur même du château de Versailles aidant beaucoup. Les décors donc, mais aussi les costumes, sont magnifiques, et glorifiés par une lumière maîtrisée et une photographie aux couleurs rappelant les tableaux de l'époque. Les personnages, quant à eux, échangent dans un langage tantôt soutenu, tantôt franchement familier à la limite de l'anachronisme, tant l'accent est mis sur leur vie, la vie commune de nobles et de bourgeois de la fin du XVIIIe, à travers leurs chamailleries, leurs repas, leurs jalousies, leurs émois, leurs retards, leurs soucis et leurs plaisirs.



Et dans tout ce beau monde insouciant s'élève Sidonie, interprétée par l'omniprésente (et quelque peu morne) Léa Seydoux. La jeune liseuse axe sa vie toute entière sur les moments partagés avec la reine, dont elle est tombée amoureuse. Sa découverte des sentiments et de la sensualité se fait progressivement, avec justesse : elle plane à travers le brouhaha révolutionnaire. Son émoi est retranscrit par une écriture assez précise qui en cerne tous les aspects, du plus candide au plus sombre. En face, Marie-Antoinette, passionnément incarnée par Diane Kruger, n'a d'yeux que pour la jolie Gabrielle, interprétée par Virginie Ledoyen dont le rôle est en fait beaucoup plus restreint que ce qu'on aurait cru, empêchant l'actrice de vraiment développer son personnage. L'homosexualité ambiante est étonnamment perçue comme tout à fait normale, voire attendue, par l'ensemble de la Cour : elle est traitée comme on souhaiterait qu'elle le soit aujourd'hui, c'est-à-dire avec le plus grand naturel qui soit. Le parti-pris, s'il est désarçonnant et presque trop peu crédible, est assez original. Le triangle amoureux se resserre étroitement, jusqu'à un dénouement profondément cynique où Sidonie se retrouve à la place même où elle souhaitait plus que tout se trouver, mais d'une façon tristement cruelle.


Mais en attendant, le film s'enfonce dans une molle bourbe d'ennui. On suit les pérégrinations de Sidonie sans jamais trop s'y attacher, on découvre sans surprise les facéties d'une Marie-Antoinette un peu trop excentrique, on se lasse des personnages secondaires qui interagissent avec l'héroïne monotone. Le tout est mal filmé, dans la mesure où à partir de la moitié du film commence soudain la Grande Fête du Zoom. S'enchaînent alors les plans où la focale augmente, en un effet inintéressant, assez émétique et digne des "Feux de l'Amour" lorsqu'une grande révélation (façon Brenda a couché avec Brendon) est dévoilée en fin d'épisode. "Les Adieux à la Reine" se terminera de façon inopinée, presque en queue de poisson, fidèle au rythme déterminément individuel et assez réaliste qu'il a choisi d'adopter, mais nous laissera nous interroger sur son propos et son intérêt profond, jusqu'à hausser les épaules et penser :


Oui, bon.

1 commentaire:

  1. Moi je veux des bisous donc je laisse mon URL ;)
    C'est marrant parce que je n'ai pas encore vu ce film (est-ce que je le verrai un jour?), mais j'ai vu une interview des actrices et du réalisateur avec des bouts du film sur Arte la semaine dernière, et je dois dire que j'ai eu la même impression que toi sur certains points (plan, platitude de l'actrice, ...) !
    Néanmoins, j'ai bien aimé qu'ils recréent des éclairages "naturels" de l'époque avec les bougies pour les nombreuses scènes en intérieur le soir. Et je rejoins ton idée sur la perception de l'homosexualité à l'époque... Comment on a pu autant régresser? J'ai bien pensé à la religion, mais à l'époque elle était encore plus présente...

    Bref, bonne critique et gros bisous !
    Manon

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